La gentillesse est parfois perçue comme une faiblesse. Un défaut. Son potentiel excès, est un thème que j’ai envie de traiter depuis très longtemps. En consultation, il est fréquent que je donne les mêmes explications face à cette capacité, qu’on reproche souvent aux gens d’avoir.
« Tu es trop gentil« , est une phrase sans cesse répétée, sans que personne n’en soit dérangé. En réalité, on se trompe de coupable. Du début à la fin. Au travers de mon travail donc, je tente de remettre les choses à leurs places. Non, personne n’est jamais trop gentil. Bien au contraire.

Je pense qu’il est important de comprendre ça, car ça compte dans un parcours empreint de spiritualité, et aussi dans l’estime de soi.

Bon nombres de phrases sans cesse répétées, sont connues de tous, prononcées par tous

– Trop bon, trop con.
– C’est bien fait pour toi, tu es trop gentil.
– Tu es trop gentil, ça devait arriver.

Et suite à diverses expériences vécues, il est courant de voir les gens s’auto flageller, toujours, eux aussi, en se mettant sur le banc des coupables :

– C’est bien fait pour moi, j’ai été trop gentil.
– C’est fini la gentillesse, maintenant je ne le serai plus.
– Voilà ce que je récolte à être gentil.

Entre les entendre et se les infliger, il est difficile de percevoir que tout ceci est totalement erroné. C’est tellement dit et rabâché depuis la nuit des temps, ça n’est tellement jamais remis en question, qu’il est aujourd’hui normal de condamner les gens faisant preuve de gentillesse. Normal même de s’en moquer. 

Les phrases citées au dessus et sans cesse véhiculées, sont, à mon sens, dans un esprit de condamnation injute des gens victimes d’abus divers et variés. Dans la phrase « trop bon, trop con », on assimile une personne gentille à un véritable décérébré, et son seul tort est… D’être gentil. Tout comme on fait, au passage, de la gentillesse un défaut véritable.
C’est une double peine : On a profité d’elle, mais en plus c’est de sa faute parce que c’est un(e) imbécile. N’est-ce pas injuste ? Est-ce que le banc des accusés ne devrait pas être celui de ceux qui méritent vraiment d’y être ? 

Si je vous dis qu’il y a un fond de vérité, vous me direz que vous avez du mal à me suivre. Pourtant, c’est une réalité. Il y a un fond de vérité, mais le résultat de ma réflexion est radicalement différent. 

Où est donc le fond de vérité ?

Dans le sous entendu des phrases. Ce qui ressort plus que maladroitement, en tout cas dans les esprits bien intentionnés, c’est que la personne a été, visiblement une fois de plus, trop gentille avec les mauvaises personnes. Mais puisque mauvaises personnes il y a et qu’on le reconnaît, pourquoi ne pas dire à ces personnes capables de manipuler et de se moquer qu’elles agissent mal, au lieu d’assommer une personne qui ne méritait pas d’être maltraitée ?

Les discours sont non seulement mal prononcés, mais la morale n’est pas faite aux personnes qui devraient l’entendre. Ces phrases sont véhiculées tout simplement et non réfléchies. Elles ne sont donc, de toute évidence, pas comprises par la plupart de ceux qui les prononcent, à moins bien entendu d’être d’une incroyable méchanceté gratuite jumelée à une parfaite sottise.
C’est bien joli de répéter une phrase que tout le monde prononce comme une vérité absolue. Mais avant de le faire, il faut en saisir le sens véritable.

Coluche a dit : Ce n’est pas parce qu’ils sont nombreux à avoir tort qu’ils ont raison. Phrase, à mon sens, d’une grande sagesse. 

Pire, parfois, on ira même expliquer que « puisque les gens sont cons, ils auraient tort de se priver », ce qui est une des phrases les plus abjectes qui soit. Rien ne justifiera jamais un abus. Jamais. 

Parce qu’une personne est gentille, ou naïve, il est donc justifié de s’en moquer, de l’utiliser, de profiter d’elle ? Non. Ces gens doivent êtres protégés, il faut leur parler, pour les aider à faire ce qui doit vraiment être fait : Être sélectifs ! 

Le problème n’est pas d’être gentil à outrance. C’est de l’être avec des gens qui ne le méritent pas. Il faut donc comprendre par là que vous pouvez donc donner votre chemise, vos deniers, faire divers sacrifices si le coeur vous en dit. Mais pas à et pour n’importe qui. Le soucis n’est pas le degré de gentillesse, c’est de l’accorder à tout le monde de façon systématique. 

A partir du moment où ceci est compris, les victimes redeviennent des victimes et les vrais coupables se retrouvent sur leur banc. Ceux qui profitent, manipulent, utilisent, sont enfin ceux contre lesquels on doit s’élever. Parce qu’ils sont identifiés comme étant ceux qui ne méritent pas qu’on leur témoigne de la gentillesse. Une personne gentille est donc celle qui ne mérite pas qu’on se moque d’elle. On la défend. 

Petite précision, pour éviter la confusion :

Lorsque je dis qu’il y a un fond de vérité, je ne perçois pas ça dans un esprit de condamnation crasse, mais plutôt comme une conséquence d’un acte, une leçon de vie, qui fait que ces phrases restent pourtant erronées, dans le sens où elles sont prononcées.

Lorsqu’une personne est gentille à répétition avec des personnes qui ne feront que se moquer d’elle, il est fatal qu’elle en subisse les conséquences. Le fait qu’elle ne comprenne pas la leçon qui est la suivante : « Non, tout le monde ne mérite pas ma gentillesse », fera qu’elle répétera ses erreurs pour finalement sans cesse être en souffrance, parce qu’elle sera toujours la victime de d’autres.
C’est là que la phrase « c’est bien fait pour toi » pourrait presque trouver un sens si elle n’était pas si condamnatoire au sens bien trop radical, et qu’elle était accompagnée d’explications bien plus sensées que de traiter la personne d’abruti. 

Que dire à une personne « trop » gentille ?

Au lieu de « c’est bien fait pour toi, tu es trop gentil », il serait préférable de dire « c’est bien d’être gentil comme tu l’es, mais tout le monde ne mérite pas ta gentillesse, soit plus sélectif, sinon voilà ce qui arrive, parce que tout le monde n’est pas gentil comme toi ».
Ça sonne déjà très différemment. C’est moins condamnatoire et dans l’esprit de celui qui entend, c’est plus positif. Il n’est pas diminué. La gentillesse qui est une qualité, n’est pas présentée et perçue comme un défaut, seule une réalité est exposée. Ça le laisse à la place de victime qui ne mérite pas ce qu’il a subit, et ça laisse celui qui profite sur le banc des coupables. 

Pour finir….

Soyez fier d’être « trop » gentil. La gentillesse n’est pas un défaut et l’être démesurément est tout à fait possible. Vous ne devez pas cesser d’être gentil, ou l’être moins. Vous devez simplement prendre conscience que la gentillesse se mérite, et que vous croiserez, toute votre vie, des gens qui ne la mériteront en aucun cas. Ne la leur donnez tout simplement pas. Mais ne perdez pas votre belle nature pour ceux là. C’est un sacrifice bien trop grand. 

Dans la même lignée, j’ai écrit il y a un moment un article sur la méchanceté. Quelque chose de jugé négativement de façon systématique. On peut lire, de façon courante comme si c’était une vérité indémontable, qu’elle n’est que l’habitude et l’aptitude des faibles, des stupides et des jaloux.
Encore des phrases véhiculées sans être réfléchies et une condamnation bien trop rapide ceux qui la manifestent…. A mon grand regret. La méchanceté a droit aux mêmes dangereuses absences de réflexion que la gentillesse ! 

Si mon point de vue sur la question vous intéresse, il vous suffit de lire l’article : La Méchanceté : Est-ce vraiment si négatif ? 

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